Les Petis Gris

My Favorite Game


Je suis assise sur une poutrelle d'un immeuble en construction depuis une éternité.

J'essaie de me reposer.

Sur la poutrelle d'à coté, Eve ronfle doucement.

Cet endroit est bizarre. J'ai si peur. Une fois sortie de la ruelle, engoncées dans des combinaisons grises, nous avons vu la réalité de ce monde.

Elle est affreuse.

Des personnes par deux se promènent sur les trottoirs au bruit de cette musique lancinante.

Derrière elles, d'autre personnes toujours par deux.

Les femmes et les hommes sont tous en gris, mal fagotés. Leur teint est blafard, et même leur chevelure n'a que de vague ressemblance avec un blond, on dirait plutôt une serpiére sale.

Les rues sont peut être encore pires. Les devantures des magasins, débordent de couleur.

Les publicités sont criardes.

De temps en temps les personnes s'arrêtent devant, rentrent même parfois, toujours sans un sourire.

Et au dessus, nous voyons les immeubles des boutiques inachevés. Le premier étage est fait, mais ensuite l'intérieur se voit, jusqu'à arriver en haut à ne voir qu'une structure fantomatique de poutrelles, qui se perd dans le plafond gris. Un chantier abandonné par ses ouvriers, partis on ne sait où.

Le pire est les espèces de moustiques qui vrombillent sans cesses autour des passants. De temps en temps un moustique arrive à piquer un de ces pauvres hères.

Alors ce qui se passe varie.

Certains commencent à courir nu dans les rues. Ceux la sont vite appréhendés par de sinistres camionnettes grises avec le Signe Antech. Une inscription en jaune. La seule couleur vive dans la rue.

Parfois le moustique disparaît, englouti par la peau de sa victime. Un bref éclair dans les yeux de celle ci. Un sourire vicieux.

Tout semble redevenir comme avant.

Parfois une personne passe en trombe dans la rue avec un grand sourire au lèvre dans un bolide aux couleurs vives. Et à ses trousses, les sectaires locaux de l'Église, prêt à tout pour faire rendre l'âme à ce rebelle.

D'autre rebelles à la longue barbe noire se promènent dans des véhicules plus ou moins customisés. Il sembleraient que l'Église les laissent faire ce qu'ils veulent... Les rares patrouilles d'hommes en grises semblent même faire un grand détour quand ils voient une barbe.

Ainsi donc voici l'Éther, pas glorieux comme coin. Faut qu'on se barre d'ici Eve et moi. Mais comment ?

Je ne sais pas comment nous sommes arrivées là. La dernière chose dont je me rappelle est la main de Kalten qui enserre la mienne. Ensuite rien, jusqu'à mon réveil dans cette ruelle sombre.

Et Eve qui dit avoir simplement sauté dans le vortex à notre suite.

Un bruit de moteur.

je tourne la tête dans cette direction. Au coin de la rue bondit une Futée[1]

De chaque vitre, un pistolet mitrailleur soutenu par un bras de costume noir.

Derrière, une camionnette.

La Futée braque fortement , fait un tour sur elle même, et s'arrête. Les deux personnes à l'intérieur font un roulé boulé dehors et mettent en visée la foule environnante.

La dite foule s'écarte mollement.

La camionnette s'arrête tranquillement, quant à elle. Six personnes en descendent. Quatre autres personnes en costume noir, lunettes noires, et cheveux coupés en brosse.

Les deux autres me rappellent douloureusement quelqu'un de mourant dans une sombre forêt. Ce sont des Scoliens. Habillés dans une espèce de combinaison marron, un holster à l'épaule, ils avancent tranquillement à l'intérieur d'une boutique que rien ne distinguait.

La situation devient intéressante, je vais peut être bientôt savoir comment sortir de ce monde...

Cinq minutes après, les deux Scoliens ressortent en tenant une sphère bleu sombre sur laquelle se meuvent de fines routes vertes. Ils rentrent dans la camionnette. Les gardes font de même. Et le convoi repart, bombant dans la nuit noir.

Et les gens n'ont rien fait, rien vu, au mieux, il se sont écartés pour éviter de se faire écraser par la Futée.

Je réveille Eve.

" - Je viens de voir des Scoliens embarqué une sphère.

- Bien sur... Tu ne serais pas en manque de chocolat toi ? Dors un peu ça ira mieux après.

- Je t'assure que ce n'est pas une hallucination. J'ai bien vu débouler des Scoliens, piquer une sphère dans cette boutique et repartir. Sans que les autres zombies ne bougent. D'ail leur Il va falloir qu'on se tire, m'est avis que si il y a eu des Scoliens dans le coin, l'église va pas tarder à débouler."

Eve se réveille complètement, écarquille ses grands yeux verts, et met un doigt devant sa bouche.

" - Non, on ne sait pas ou on est. Donc quitte à tout perdre, autant rester. Si l'église est à la foie ici et chez nous, nous pourrions peut être bien glaner quelques indices à regarder oeuvrer la police.

- Pas con."

Et donc, Eve et moi se mirent à attendre l'arrivée de l'Église sur les lieux du crime.

" - Inquisiteur ! Nous avons un soucis. Un Démultiplicateur Narcissique Symbiotique a été volé par des les Scoliens.

- Et c'est grave ?" demanda je d'un air narquois.

" - C'est gravissime " me fit le sycophante qui commençait, comme ses semblables, à me courir sur Le Haricot. ce monde est gris, affreusement gris. Je comprends les peurs du Princeps.

- Alors expliquez moi pourquoi! Je ne suis pas d'ici au cas ou vous ne vous en seriez pas rendu compte," fit je, mordant.

" - Il est vrai. Les Démultiplicateurs Narcissiques Symbiotiques sont au nombre de treize. Ils assurent en grande partie la gestions des flux itinérants des personnes et leur comportement individuel, en vu de réguler notre meilleur des mondes.

- Si vous le dites.

- Je le dis.

- L'humour, vous connaissez ?

- non, cela a été interdit par les Démultiplicateurs, Trop de gens ne le comprenaient pas et cela risquait d'induire des fluctuations intempestives dans la bonne gestion.

- Passons, et bien entendu, vous n'avez aucun moyen de le remplacer. Voir même la possession de ce truc permet aux Scoliens d'avoir un pied dans notre dispositif ?

- Vous êtes devin, Inquisiteur"

Je soupira. Un jour je comprendrais l'attirance pathologique des êtres humains pour les édifices qui reposent sur des verres en cristal...

" - Et je viens faire quoi là dedans, je ne suis pas là pour chercher un objet que vous n'êtes pas capable de conserver, mais pour retrouver deux personnes indispensables aux plans ineffables de l'Église.

- Justement, vous n'avez pas manqué de remarquer qu'il y a un léger laisser aller, voire une légère déprime ambiante. Si le bras droit du princeps faisait une apparition, cela permettrait de motiver activement les groupes et par là même avancer votre recherche.

- Moui " fit je dubitatif. Il était vrai que mon enquête n'avançait que pas. A part trois cadavres dans une ruelle, rien d'anormal. Bizarre d'ailleurs que cette fille a pu neutraliser trois agents sans problèmes alors que quand je l'avais ramassé, elle me paraissait assez collé-monté... Enfin les situations de stress...

" - Inquisiteur ? "me fit le vicaire soucieux.

Je repris mes esprits.

" - oui vous avez raison, et puis peut être trouverais je une piste pour ma petite affaire."

" - On the floor of Tokyo

- Or down in London town to go, go

- With the record selection

- With the mirror reflection

- I'm dancing with myself

- Ce soir chez les BIB c'est soirée Disco ! "

Je venais de rentrer dans le mess des Barbus In Black, accompagné de De Nemours. Nous venions d'atterrir, après un long trajet, dans une soirée détente des rebelles redoutés par l'Église. J'entends un pouffement reprisé. C'est de Nemours qui essayait en se mordant la langue d'éviter de rigoler. Il est vrai que ce n'est pas facile de danger avec une longue et touffue barbe . A moins que cela soit du au fait de voir des barbes factices sur certaine femmes. Personnellement, je trouve ce look assez sympathique. Bon certaines de mes connaissances trouve que j'ai un goût du kitsch très sur, mais je m'éloigne, je m'éloigne. Je suis venu ici pour trouver quelqu'un. Je fouille le fond du mess à la recherche d'Iggy, l'officier des BIB en charge des approvisionnement en basasse.

Je le trouve enfin, affachi sur un divan, une femme brune à moitié occupé de lui faire des bigoudis avec sa barbe. Il se laisse faire, il doit être de très bon poil ou complètement imbibé ce soir, autant en profiter.

" - Bonsoir Iggy !

- Bonsoir Kalten !

- Comment ça va ?

- Bien, bien, bien, l'alcool coule à flot, et la musique est bonne.

- Tant mieux ! Dis moi, pourrais tu me rentre un petit service ?

- Si cela est dans mes cordes, inestimable pilote que tu es.

- Voila, j'aurais voulu savoir si tu avais un châssis monospace à me prêter.

- Gotcha ! Je suis désolé. Le seul que j'ai est un bi-hexa Yeon et le contrôleur principal est carbonisé. A notre grand regret d'ailleurs. Ce genre de truc, c'est un appui non négligeable dans notre lutte contre l'Église.

- Donc vous que vous ne vous en servez pas, je peux le prendre ?"

Il a l'air surpris par ma demande.

" - Oui, mais bon pour ce que cela va vous servir. Enfin passez demain matin.

- merci, à demain !"

Le lendemain, j'accompagne Kalten dans le hangar de la base des BIB pour récupérer un engin qui ne pourra jamais nous servir. J'ai essayé d'en convaincre Kalten, mais à chaque fois il me fit un grand sourire niais. Pourtant, on ferait mieux d'aller chercher une machine ailleurs. Si ces barbus ne sont pas arrivés à faire marcher cette épave, je n'y arriverais pas non plus, et ce n'est pas ce dandy de Kalten qui va y arriver.

Enfin nous arrivons dans le recoin du hangar indiqué par Iggy.

La devant nous se dresse le fameux bi-hexa Yeon. Sur que si elle fonctionnait celai serait un atout de taille pour notre mission avec ses grand flancs gris, légèrement abîmés. Seul un coin noirci indique l'emplacement du contrôleur.

Kalten fait un grand sourire et se tournant vers moi, tapote le châssis et me fait

" - Tu vois, la réalité est le plus beau des rêves "

Et j'ai l'impression que sa main se met à luire brièvement pendant qu'il tapote la babasse.

" - Bon, tu viens, on va voir ce qu'on peut tirer de ce petit bijoux" fit-il en sautant sur le pont d'embarquement.

" - Alors, ou est le contact sur cette fichu machine ?" fit il en regardant le tableau de bord. Il farfouille, je le regarde, narquois dans l'entrebâillement de la porte.

" - Tiens une DeBean... Ouch c'est réglé sur conduite pépère ! Sans doute le précédent proprio préférait toucher du bois. Ça ne va pas nous convenir. bon on va attendre la fin des tests avant de recabler tout ça"

Et devant moi, la machine finit ses tests. Le contrôleur vient de ressusciter. Cet homme est un démon !

Dans la rue en dessous de nous, de nombreux véhicules sont devant, de nombreuses personnes en costards grise vont et viennent. Elles s'affairent, discutent, déambulent, le tout par un résultat qui ne me parait pas bien évident

Tient, une personne commence à hurler des recommandations, ça sens l'officiel qui va venir inspecter.

Qu'est ce que je disais, voila une grosse voiture qui arrive. Tout le monde arrête de faire semblant de chercher des indices et se tourne vers le véhicule, puis fait semblant de reprendre ses activités.

Enfin ! La grande ponte descend. Tiens un reflet or sur son veston gris. Mais c'est mon tortionnaire. Celui a qui j'ai été confié par la police pour s'occuper de mon cas manifeste de paranoïa délirante quand j'ai voulu raconté ce que m'avait dit le Scolien mourant. Quel nom m'avait dit Kalten ? Ah oui Dupont. Et bien s'il est ici, c'est que nous devons pouvoir rentrer chez nous. Plus qu'à le suivre donc.

" - Eve, le type en costard gris qui vient de descendre je le connais, si on le suit on devrait pouvoir revenir chez nous, non ?

- Oui ! Il ne nous reste plus qu'a redescendre de notre perchoir et à se procurer un véhicule."

Je soupire, il n'y a strictement rien d'intéressant ici. les Scoliens ont bien fait leur boulot, eux ! Ils n'ont laissé aucun indice. Si ces andouilles pouvaient faire de même. Ce monde est pourri jusqu'à la moelle. Aucune motivation dans les fiefs de l'église. J'espère que ce n'est pas ce que nous aurons partout d'ici quelque temps. Il va falloir franchement faire quelque chose. Nous avons la domination, certes, mais nous dominons quoi, des larves ! Rien d'intéressant.

Zut je déprime ici, je finis de donner quelques encouragements, et je me tire de cet endroit, qu'ils se débrouillent avec leur Démultiplicateur. Je m'en lave les mains.

Enfin ! Revenu dans la voiture, en attendant de revenir au palais épiscopal, je me demande comment je vais bien pouvoir retrouver ce Kalten. Il doit s'être mis en contact avec ce groupe de rebelle que sont les BIB, qui terrorise les pontes locales de l'Église. Connaissant cette bande de trouillards, ça doit être du niveau de l'escargot asthmatique à la conquête d'un bloc de béton. Et ces andouilles n'ont même pas été foutu d'introduire un espion chez ces barbus...

Tiens à propos d'andouille, je suis suivi, et mon chauffeur ne s'en est même pas rendu compte. Deux femmes sur une moto, une grande rouquine et derrière on dirais, oui c'est ça, c'est ma petite Anays. Je comprends mieux pourquoi je ne trouvais aucune piste, ce n'est pas une jeune fille seule et éplorée que je traque, mais deux filles motivées.

Anays a du m'apercevoir et très judicieusement en a déduit qu'en me suivant elle pourrait sortir de ce calvaire. Que fais je ? je les fais arrêter, non ? Ce n'est pas une bonne idée, avec les bras cassés dont j'ai hérité. Laissons les me suivre et tenter de pénétrer dans le palais, cela sera plus facile ensuite d'amener Kalten devant le Princeps, si il est juste à coté du Kern.

Bon De Nemours et moi avons recablé en entier la machine, la DeBean est configurée en position sportive (avec quelque soucis quand même mais bon on risque toujours de casser ses jouets quand on les modifie, non ?), mais nous voila fin prêt.

Nous nous installons aux commandes, et je fais vrombir le Kernel. Le démarrage s'effectue tranquillement pendant que nous surveillons les différents indicateurs.

Nous pouvons partir. De Nemours me regarde d'un air attéré quand je pontifie :

- En route vers de nouvelle aventures !



[1]cd in english..